Mercredi 10 avril 2019
Segovia***
La pluie, le vent et le froid (3°) nous ont découragés de visiter Segovia en vélo. Nous sommes donc partis à pied, courageusement, sous nos parapluie. Un bon km et demi depuis le parking des camping-car jusqu’à l’aqueduc*** romain. Quel génie !
Simplicité, élégance, efficacité : 728 m de long, 28 m de haut (là où le sol est le plus bas), 158 arches sur 2 étages construites en pierres de granite à joints vifs, il fut érigé au 1er siècle sous l’empereur Domitien pour acheminer l’eau dans la partie haute de la ville.
Le sgraffite est l’une des caractéristiques principales de l’architecture de Ségovie. Voici quelques uns des motifs que j’ai pu voir :
Nous voici à la cathédrale**. On ne s’est pas attardés en route.
Elle fut construite sous le règne de Charles Quint après la destruction de la précédente cathédrale lors du soulèvement des comuneros en 1521. Elle est un exemple de la survivance du gothique au 16ème siècle, en pleine période renaissance.
Impressionnante à l’extérieur, elle m’a un peu déçue à l’intérieur.
Heureusement il y a aussi une partie musée qui présente des objets intéressants : des tapisseries, des vêtements ou des objets liturgiques, des peintures (mais là, pas le droit de photographier … sauf que j’avais déjà fait une photo quand on me l’a dit). Comme ce curieux véhicule, que je suppose destiné à transporter des reliques lors de processions :
Et puis le cloître est magnifique. Un peu austère, mais d’une précision et d’une perfection qui font oublier son manque de fantaisie.
Et nous repartons sous la pluie glacée (l’Espagne, un pays chaud ? Pas aujourd’hui, en tout cas!) vers l’Alcazar**.
Forteresse construite au 13ème siècle, transformée aux 15 et 16èmes siècles, il a servi successivement de siège pour les états généraux, d’académie militaire, puis de prison d’État pour les pirates capturés sur les côtes de Tunis. A la suite d’un incendie en 1862, certaines parties ont été reconstruites en style néogothique.
Nous ne le visiterons pas. Une seule envie, retourner se mettre au chaud dans le camping-car. Mais il faut faire 3 km à pied dans l’autre sens . Brrrr …
Après un repas bien chaud avec des habits secs, nous nous lançons à l’assaut de la Sierra de Guadarrama.
Ségovie étant à plus de 1000 m d’altitude, il nous fallait tout de même passer un col à 1860 m. Col fermé. Nous avons pris une autre route, moins pittoresque, par le Puerto de Guadarrama, seulement à 1531 m. En route, de la pluie, de la neige et des rafales de vent, mais nous arrivons au Monastère de l’Escorial avec un rayon de soleil.
Son vrai nom, c’est San Lorenzo El Real. C’est Philippe II qui fit construire ce bâtiment emblématique, créant ainsi un style alliant la magnificence d’un palais et l’austérité d’un monastère.
Le guide Michelin a beau dire que les appartements royaux sont magnifiques, l’extérieur ne nous donne pas envie de visiter l’intérieur. D’ailleurs la visite dure 2 heures, et il est déjà 16 h 30. Après cette journée éprouvante, nous avons besoin de repos.
Demain, c’est Avila.
Jeudi 11 avril 2019
Avila**
Au réveil, un ciel tout bleu ! Mais du givre sur le pare-brise. Et toujours du vent.
Avila se dresse à 1131 m d’altitude sur les hauts plateaux de la Meseta. Et malgré le soleil, il ne fait pas chaud.
C’est pourquoi nous n’avons pas pris les vélos pour faire le tour de la Muralla. C’est à dire les 88 tours des remparts*** d’Avila.
Elevés sur des restes de fortifications héritées des romains et des arabes, ils datent en grande partie du 11ème siècle et présentent une grande unité. Haute de 12 m et épaisse de 3 m, la Muralla forme un ensemble de plus de 2500 m de périmètre. Neuf portes et diverses poternes en font l’un des meilleurs exemples de fortification médiévale en Europe.
La cathédrale**, dont le chevet est imbriqué dans le rempart, formant une grosse tour ronde plus ouvragée que les autres, est assez austère dans son architecture extérieure. Je n’ai pas visité l’intérieur.
Nous ne nous sommes pas attardés à Avila, ayant hâte de descendre vers le sud et d’y trouver un peu plus de chaleur.
Au fil des paysages, nous avons trouvé ces 4 taureaux sur le bord de la route : les Toros de Guisando.
On les date entre le 4ème siècle avant J.C. et le 2ème ou 3ème après J.C.
Ce sont des sculptures zoomorphes dont la signification reste obscure. On pense à un culte celtibère local. A cette époque, ce sont les Vettons qui habitaient cette région.
En Castilla-La Mancha
Tolède***
Vendredi 12 avril 2019
Nous sommes arrivés hier en fin d’après-midi à Toledo, sur un grand parking au bord du Tage (Tajo), à l’entrée de la vieille ville.
Ce matin, nous n’avons eu qu’à traverser le vieux pont d’Alcantara pour entrer dans les remparts et monter dans la vieille ville, environ 150 m de dénivelé.
C’est la cathédrale*** qui s’est présentée la première sur notre itinéraire. Qu’elle merveille !
Commencée en 1227, elle adopte le style gothique français. Mais sa construction s’étant prolongée jusqu’à la fin du 15ème siècle, elle laisse apparaître aussi tous les stades du gothique espagnol. La richesse de la décoration sculptée et l’accumulation d’œuvres d’art en font presque un musée de l’art religieux.
Il est assez difficile de photographier l’extérieur, à part la façade du pardon, car elle est coincé entre des petites rues très étroites.
Les sculptures, à l’intérieur, sont tellement foisonnantes, que je ne peux que vous mettre des petits échantillons. Si ça vous plaît, un conseil : allez la voir ! A moins qu’internet ne vous donne satisfaction …
Après la cathédrale, nous sommes allés voir la synagogue del Transito**.
C’est un petit édifice d’apparence banale, mais dont l’intérieur surprend par sa merveilleuse décoration mudéjare** couvrant le haut des murs et le chevet. Un beau plafond artesonado en bois de cèdre couvre cette grande salle rectangulaire.
Les salles annexes de cet ancien couvent de Calatrava sont converties en musée séfarade et contiennent de belles pièces d’origine judaïque.
Le troisième et dernier monument que je voulais visiter, c’est le Monastère de San Juan de los Reyes**.
Erigé par les Rois Catholiques, reconnaissants envers Dieu d’avoir remporté sur les Portugais la victoire de Toro, le monastère fut confié à l’ordre franciscain. L’ensemble est très représentatif du style isabelin, qui mêle au gothique flamboyant quelques touches de mudéjar et même de renaissance.
La visite se compose de l’église, du cloître bas et du cloître haut.
Dans la ville, au passage, nous avions tout de même fait quelques photos : monuments ou boutiques des spécialités de Tolède.
Mais nous sommes à l’autre bout de la ville, et il nous faut revenir au camping-car !
Pour cela, depuis le couvent nous descendons des escaliers qui nous mènent au bord du Tage, où passe le GR 113, près du pont médiéval de San martín. En suivant le Tage, nous revenons jusqu’au pont d’Alcantara d’où nous sommes partis. Total : une petite randonnée d’environ 7 km. Et maintenant : à table !
En repartant, notre route longe de nouveau le Tage, mais sur l’autre rive, et à la hauteur de la ville. Résultat :
Nous continuons notre route vers le sud, vers Consuegra, un village de la Mancha.
Dans la Mancha, dont la toponymie arabe signifie « terre sèche », il n’y a pas assez d’eau pour faire tourner la roue des moulins, mais il y a assez de vent pour faire tourner leurs ailes !
Surplombant le village, 10 pittoresques moulins à vent se succèdent sur une crête dominée par un château en ruines. Impossible de ne pas penser au Chevalier à la Triste Figure !
En cherchant un parking pour la nuit, nous tombons sur un site archéologique : le Castillo de Calatrava la Vieja. Il est 18 h 30, la visite ferme à 20 h, je pars donc en faire la visite.
Mais d’abord, un peu d’histoire :
La ville de Calatrava fut fondée par les Oméyades en 785. Au 12ème siècle, époque de la Reconquête, Alfonso VII prit la ville et en fit la place chrétienne la plus avancée de cette époque. C’est là que fut fondé l’Ordre de Calatrava, un ordre à la fois militaire et monastique, qui remplaça les Templiers. La ville changea de maîtres plusieurs fois après diverses batailles (Alarcos, Las Navas de Tolosa). Appartenant définitivement aux chrétiens, elle fut tout de même abandonnée en 1217 pour cause d’insalubrité : elle est entourée d’eau et de marécages, au bord du rio Guadiana. L’Ordre de Calatrava déménagea dans une autre forteresse, et celle-ci prit le nom de Calatrava la Vieja (la vieille).
Samedi 13 avril 2019
Almagro**
A Almagro, c’est la Plaza Mayor** qui étonne. Elle a servi, pendant des siècles, de cadre à des corridas et des joutes.
Sur deux côtés, une colonnade en pierre supporte 2 étages de fenêtres aux boiseries peintes en vert.
Il y a aussi un charmant petit théâtre, construit au 17ème siècle. Les lampes à huiles, le vieux puits, le mur de scène avec les balcons, tout est d’époque. C’est le Corral de Comedias*, et chaque été il accueille un festival de théâtre classique.
C’est en flânant dans les ruelles pavées d’Almagro (qui au 13ème siècle ont servi de base aux moines-soldats de l’Ordre de Calatrava), que nous avons compris, en voyant les préparatifs, que le lendemain, jour des Rameaux, serait aussi jour de procession.
Et que notre visite du lendemain à la grande mosquée de Cordoue risquait fort d’être compromise. Nous avons donc dérogé à notre règle, et tracé d’un coup 160 km d’autoroute pour y être vers 16 h.
Mais avant, il y a la forteresse de Calatrava la Nueva, perchée en haut de 2 km de route pavée, que nous n’avons pas voulu manquer, même si on ne s’y est pas attardés.
L’ordre de Calatrava (dépendant des Cisterciens) s’est installé ici, à 44 km de leur premier château (voir la visite d’hier soir). Ils sont en hauteur et ne craignent plus les miasmes. Et puis celui-ci est plus facile à défendre. Il n’avait qu’une enceinte, mais ils en construisent une deuxième, celle qui abrite l’écurie. Plus tard, il y en aura une troisième, avec la porte rouge et sa herse, par où nous sommes entrés.
La suite de l’histoire ? L’ordre a maintenu son couvent principal ici durant presque 600 ans, jusqu’à ce que, finalement, il soit abandonné, en 1804, transférant les derniers frères dans la petite ville d’Almagro (ci-dessus).
Et maintenant, en route pour Córdoba*** !