L'abbaye de la Sauve-Majeure est un ancien monastère de l'ordre de Saint Benoît (bénédictin) classée en décembre 1998 au patrimoine mondial de l'UNESCO au titre des chemins de St Jacques-de-Compostelle en France.
Fondée en 1079 par le duc d'Aquitaine et Gérard de Corbie, elle abrite, à son apogée, quelque 300 moines.
Au Moyen Âge, l'abbaye est riche et puissante. Elle dispose de 51 prieurés, jusqu'à Burwell, en Angleterre.
Après les ravages de la guerre de cent ans, des réparations sont effectuées sur l'édifice au XVIe siècle, des fortifications sont apportées. Ces restaurations interviennent dans un climat de contestation des privilèges de l'abbaye et de rivalité économique avec la bastide de Créon. S'amorcent alors le déclin de l'abbaye et la perte de son influence.
En photo : l'abside et ses chapiteaux
Pendant sept siècles, l'abbatiale de la Sauve-Majeure est le plus beau joyau d'architecture de toute la Gironde, jusqu'au début du XIXe siècle. Après que l'Assemblée constituante de 1789 a chassé les moines, les bâtiments s'effondrent lentement mais sûrement. Le monument est légalement exploité comme carrière de matériaux et pierres de taille où s'approvisionnent entrepreneurs, chaufourniers et cantonniers de la région. Les antiquaires, en quête de belles pièces, enlèvent des sculptures, qui se trouvent actuellement dans des collections privées. La destruction est arrêtée en 1840, avec le classement de l'abbaye aux monuments historiques.
En 1837, l'archevêque achète les bâtiments conventuels et fait édifier un collège de jésuites. Celui-ci est plus tard transformé en école normale d'instituteurs. Mais, en 1910, un incendie détruit l'école, et le site est de nouveau abandonné. Entre 1914 et 1918, les bâtiments sont transformés en petit hôpital militaire de campagne.
En 1960, le monument est récupéré par l'État. Le ministère des affaires culturelles entreprend d'importants travaux de consolidation.
Voici les chapiteaux de la plus grande absidiole, appelée aussi chapelle Sainte Madeleine (tous les chapiteaux sont ainsi expliqués dans un excellent guide de visite). A vous de retrouver les numéros (ils sont dans l'ordre, il suffit d'identifier le premier).
- l'histoire d'Adam et Eve : au milieu, Adam prend conscience du péché. Il se tient la gorge et cache sa nudité. A droite, Eve tend le fruit défendu à Adam, cachant elle aussi sa nudité. A gauche, Adam subit sa punition : travailler la terre à la sueur de son front.
- les sirènes-poissons, symboles de la séduction et du mal, en référence à l'Odyssée, et à rapprocher du chapiteau suivant des Ulysses.
- Les Ulysses : personnages entravés, avec des liens végétaux, pour résister aux sirènes.
- Le persécuteur du prophète Daniel est livré aux lions pour l'avoir dénoncé injustement.
- Combat fabuleux entre deux basilics (monstre à corps de coq et queue de serpent dont le regard réduit en cendres) et deux serpents. Représentation de la puissance de Satan et des déchirements et périls qu'il fait encourir à l'homme.
- les lions bicorporés : une seule tête occupant l'angle de la corbeille du chapiteau. Ce type d'animaux se retrouve dans la décoration de certains manuscrits du XIIème siècle.
Les médaillons de consécration :
Grimoald, treizième Abbé, après douze ans de travaux, met fin aux constructions et célèbre la dédicace de l'église en 1231. En commémoration de la consécration, douze médaillons, représentant les apôtres, ont été placés sur le pourtour intérieur de l'église. Aujourd’hui, il n'en existe plus que six :
saint Barthélémy, saint Jude, saint Jacques le Majeur, saint Pierre, saint André, saint Matthieu.
Ils ne sont pas faciles à voir, et moi je n'en ai trouvé que cinq. Saurez-vous me dire quel apôtre est manquant ? Tous portent une église dans leur main gauche.
En ce qui concerne les bâtiments clautraux, tout n'est plus que ruines. Il n'en reste encore debout que des substructions de la salle capitulaire et les deux pans de mur du réfectoire, qui date de 1295. L'ensemble monastique où vivaient une centaine de moines en 1231 (et plus de 300 à son apogée) a disparu.
Et, bien sûr, je suis montée dans ce qui reste du clocher. C'est de là-haut que j'ai photographié les ruines.
Après cette longue mais très instructive visite, nous avons été voir cette église Saint Pierre, que j'avais vue depuis le haut du clocher.
Fondée elle aussi par Gérard de Corbie en 1083, elle est reconstruite au 12ème siècle. Sur une hauteur, elle fait face à l'entrée de l'abbaye, ce qui lui confère une importance certaine.
Au-dessus de la porte d'entrée, Saint Pierre accueille les fidèles. La petite statue, à sa gauche, représente peut-être Saint Gérard (de Corbie), en abbé mitré.
Etonnamment, le chevet semble l'élément le plus important de l'église. Trois fenêtres forment triplet, et quatre statues constituent son décor :
- Saint Pierre, qui tient la clé pour ouvrir les portes du paradis
- la Vierge et l'Enfant
-Saint Jacques avec son bourdon (pour marcher et se défendre)
- Saint Michel terrassant le dragon. Remarquez que pour caser ses ailes d'archange, il a fallu faire une niche plus haute que les autres.
A leur côté, une petite statue de Saint Gérard en orant, toute d'humilité.
Au-dessus, une rangée de modillons, et sur l'autre façade, la statue d'une belle sainte dont je n'ai pas pu trouver le nom.
Dommage qu'elle soit fermée. Mais si vous voulez la visiter, Wikipédia met plein de photos de l'intérieur.
Quant à nous, nous partons pour la prochaine étape : Saint Emilion. Ce n'est pas le bon vin qui nous attire, mais ... chut ... son église monolithe souterraine !!